« On a souvent présenté la technologie comme un levier pour mettre fin aux divisions sociales » (Boyd, 2016). Le confinement de 2020 nous a été imposé. Nous n’étions techniquement pas préparés. Le défi fut de garantir la continuité pédagogique à tous. Les élèves de ce lycée professionnel, essentiellement féminins, équipés de leur seul téléphone portable, allaient devoir faire confiance à leur enseignante en anglais. Dans un contexte de « généralisation du smartphone » (Amey & Salerno, 2015), Snapchat fut choisie, application de partage de documents s’autodétruisant dès la lecture effectuée mais conservés si le lecteur décide d’enregistrer, utilisée par 88 % des 15-18 ans (90 % de filles) (Génération Numérique, 2021).

Apprentissage accessible à tous

Proposer un modèle familier pour assurer cohérence et mutualisation : effectuer l’appel, dérouler la séance, donner les consignes du travail individuel (décrire une illustration), de groupes (rédiger un paragraphe reprenant les éléments de description collégiale), de classe entière (pauses structurales, bilans).

Individualiser : dédramatiser (snaps privés), respecter les rythmes (exercices effectués et postés entre deux séances).

Diversifier méthodes et outils pédagogiques : liens vers les notions clés (vidéos, écrits, enregistrements audios, diaporamas) et les exercices. Correction individualisée par le snap privé.

Être flexible : capture d’écran (consignes communes), téléchargement permettant les feedbacks pour progresser (écoute de documents authentiques).

Approfondir les acquis en éducation aux médias et à l’information (loi 2013) : respecter les vies privées, user d’un langage adapté, éditer, publier, télécharger, participer, collaborer.

100 % de présents … fin des divisions ?

La création de groupes demande d’accepter l’autre comme « ami », remettant en question le statut d’enseignant.

L’autorisation des parents des mineurs peut être longue à obtenir.

L’utilisation est basée sur la confiance (ne pas tricher …).

Snapchat ne remplace pas l’ordinateur absent ou partagé à la maison, ne résout pas les problèmes de réseau et ne garantit pas l’isolement nécessaire au travail.

En définitive …

Le recours à une application familière des jeunes a permis de les fidéliser. Ils sont, le temps d’un aléa technique, devenus les formateurs des camarades et de l’enseignante. En permettant l’optimisation de leurs pratiques numériques, nous avons pu travailler dans « un modèle de coopération permettant l’intégration sociale » (Cordier, 2015) : peu de décrochage, modèle proche de celui vécu en classe, outil maîtrisé.

Cependant, ce ne sont effectivement pas les usages numériques qui freinent les acquisitions scolaires (Alava, 2013), les élèves maîtrisent l’usage de Snapchat. Nous nous sommes assurés de leur présence, mais, quand il a fallu sortir de l’aspect ludique (bitmojis pour exprimer un sentiment, écrit illustré dans sa story), pour passer en mode Travail (exercices évalués, respecter les délais, faire seul), ce fut plus difficile. Nous avons privilégié la quantité plutôt que la qualité, essai-erreur qui a demandé de revoir nos pratiques numériques pour arriver à un enseignement à distance idoine.

Sources

https://e1.pcloud.link/publink/show?code=XZkytFZHzqgnyaMOmm4dOq1hsbbSXGRhDcy